Inhumation par erreur dans une concession : que dit la loi ?

Eliott RUBINI    |   12/11/2025
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Une inhumation par erreur dans une concession funéraire n’entraîne pas d’emprise irrégulière : retour sur la décision de la Cour d’appel de Riom et la responsabilité du maire.
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Une récente décision de la Cour d’appel de Riom (9 septembre 2025, n° 23/01143) apporte un éclairage utile sur les conséquences juridiques d’une inhumation par erreur dans une concession funéraire.

Contrairement à ce que soutenait la concessionnaire, une telle erreur ne constitue pas une emprise irrégulière, même si elle peut soulever des questions de responsabilité pour la commune.

Inhumation par erreur dans une concession funéraire : les faits à l’origine du litige

Le 2 mars 2021, une usagère d’un cimetière avait acquis à l’avance une concession funéraire trentenaire pour elle-même et son conjoint.

Quelques mois plus tard, le 4 novembre 2021, elle découvre qu’un corps avait été inhumé par erreur dans sa concession par une entreprise de pompes funèbres.
La situation fut régularisée le 7 février 2022, après transfert du défunt dans une autre sépulture.

Estimant avoir subi un préjudice, la concessionnaire assigna la commune gestionnaire du cimetière devant le tribunal judiciaire le 14 juin 2022.
Elle soutenait que cette inhumation par erreur dans une concession funéraire constituait une emprise irrégulière et sollicitait :

  • le remboursement au prorata du prix de la concession (2,34 €) ;
  • 10 000 € de dommages et intérêts pour préjudice moral.

Inhumation par erreur dans une concession funéraire : la notion d’emprise irrégulière

La Cour d’appel de Riom a rappelé la définition juridique de l’emprise irrégulière :
il s’agit d’une atteinte à un droit immobilier par une personne publique, sans pour autant entraîner l’extinction du droit de propriété.

Depuis l’arrêt du Tribunal des conflits "Panizzon" du 9 décembre 2013, les litiges relatifs à une emprise immobilière – y compris les demandes d’indemnisation – relèvent désormais du juge administratif.

La commune avait donc logiquement soulevé une exception d’incompétence du juge civil.
Toutefois, de manière surprenante, cette exception fut rejetée, et l’affaire examinée par la juridiction judiciaire.

Inhumation par erreur dans une concession funéraire : les demandes de la concessionnaire

La concessionnaire considérait qu’elle avait subi une atteinte à son droit d’usage sur la concession et qu’une inhumation par erreur dans une concession funéraire devait être assimilée à une emprise irrégulière.

Mais le tribunal judiciaire rejeta ses demandes, estimant que l’erreur n’avait pas eu pour effet d’éteindre son droit d’usage.
La concessionnaire fit alors appel devant la Cour d’appel de Riom, qui confirma cette décision.

Inhumation par erreur dans une concession funéraire : absence d’emprise irrégulière

Dans son arrêt, la cour explique que l’inhumation par erreur dans une concession funéraire constitue certes une occupation illicite temporaire, mais ne peut être qualifiée d’emprise irrégulière, car elle n’affecte pas la nature du droit du concessionnaire.

« La concessionnaire ne peut revendiquer aucun droit de propriété immobilière sur la concession litigieuse. Elle n’est titulaire que d’un droit d’usage temporaire de 30 ans, limité à l’inhumation d’elle-même et de ses ayants droit. »

L’erreur d’inhumation, bien qu’illégale, n’a pas éteint ce droit d’usage.
La cour précise que la concessionnaire pouvait exercer d’autres recours, non pour emprise immobilière, mais pour atteinte à son droit d’usage de la concession.

Inhumation par erreur dans une concession funéraire : responsabilité civile de la commune

L’emprise irrégulière étant écartée, la cour évoque la possibilité d’engager la responsabilité de la commune sur le fondement de l’article 1240 du Code civil :

« Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

Cependant, la Cour d’appel de Riom a jugé que la commune n’avait commis aucune faute, considérant que l’erreur provenait exclusivement de l’entreprise de pompes funèbres ayant procédé à l’inhumation.

Elle conclut que la concessionnaire aurait dû diriger son action contre cette entreprise, et non contre la collectivité.

L’arrêt confirme donc le jugement de première instance et rejette toutes les demandes d’indemnisation.

Inhumation par erreur dans une concession funéraire : remarques et critiques

1️⃣ Une question de compétence juridictionnelle

Il est étonnant que le juge civil ait été saisi, alors que la jurisprudence Panizzon attribue désormais cette compétence au juge administratif.
La décision aurait dû logiquement relever du contentieux administratif.

2️⃣ Une action mal dirigée

La concessionnaire n’a pas assigné l’opérateur funéraire à l’origine de l’inhumation erronée.
En saisissant conjointement la commune et l’entreprise funéraire, elle aurait pu espérer une condamnation solidaire (in solidum).

3️⃣ Une faute de surveillance du maire

La cour exonère totalement la commune, oubliant que le maire est responsable de la police des funérailles et des cimetières (art. L. 2213-8 du CGCT).

« Le maire assure la police des funérailles et des cimetières. »

En autorisant, même par négligence, une inhumation par erreur dans une concession funéraire, le maire a manqué à son devoir de surveillance.
Une telle faute pouvait justifier l’engagement de la responsabilité de la commune.

4️⃣ Un préjudice moral sous-estimé

La cour n’a pas reconnu le préjudice moral évident subi par la concessionnaire du fait de la présence temporaire d’un défunt étranger dans sa sépulture.
Ce dommage, bien que symbolique, aurait mérité une indemnisation minimale en réparation du trouble causé.

Inhumation par erreur dans une concession funéraire : une décision qui interroge

En conclusion, la Cour d’appel de Riom rappelle qu’une inhumation par erreur dans une concession funéraire ne constitue pas une emprise irrégulière, mais peut néanmoins engager la responsabilité du maire ou de l’opérateur funéraire en cas de faute prouvée.

Cette décision met en lumière la complexité des droits attachés à la concession funéraire, qui confère un simple droit d’usage et non un droit de propriété, tout en soulignant l’importance du contrôle municipal sur les opérations d’inhumation.

Texte intégral de la décision :
Cour d’appel de Riom, 9 septembre 2025 – n° 23/01143

 

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